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Vieillir au-delà des stéréotypes : façonner une nouvelle histoire pour le troisième acte

Publié dans : Blog
Posté sur : 27 novembre 2024

par Mitzi Murray

Vieillir… Tout le monde le fait! Si vous ne le faites pas, vous êtes mort·e. Mais vous n’êtes pas mort·e, parce que vous lisez ce blogue. Bravo! Sur les deux points!

Plus sérieusement, il n’y a pas d’échappatoire possible. Quels que soient nos efforts, nous vieillirons tou·te·s. Pourtant, la société occidentale est terrifiée par le vieillissement, et nombreux·euses sont ceux·celles qui appliquent la théorie de la gestion de la terreur pour y réfléchir et y faire face.

La théorie de la gestion de la terreur n’est qu’un terme de recherche astucieux pour désigner le concept selon lequel les grands groupes, voire des sociétés entières, prennent des décisions, ou, plus important encore, remettent la prise de décisions, principalement pour se rassurer en évitant de réfléchir à des sujets délicats.

Curieusement, des recherches menées par l’Université Yale montrent qu’en acceptant que nous vieillissons, en conceptualisant ce que nous voulons en retirer et en voyant les aspects positifs, nous pouvons ajouter jusqu’à sept ans à notre vie. Et comme nous allons adopter une attitude positive à l’égard du vieillissement, ces sept années supplémentaires seront les bienvenues. 

Les personnes âgées et celles qui le deviendront auront donc tout intérêt à discuter de ce que sera leur troisième acte de vie. Pour la plupart des Occidentaux·ales, ce troisième acte commencera à la soixantaine, mais ce n’est malheureusement pas le cas pour tout le monde.

Dans ces conditions, le défi auquel nous sommes confronté·e·s est de savoir comment envisager notre meilleur troisième acte, si tout le contenu et les images qui nous sont présentés disent que le vieillissement est synonyme de décrépitude, de déclin et de fragilité. 

Les médias les plus influents et les plus accessibles de notre culture sont les films et les médias cinématographiques, et l’apport sensoriel qu’ils fournissent influe sur la manière dont nous construisons notre base de connaissances existante. Pendant des décennies, le cinéma a joué un rôle majeur dans l’âgisme, et les personnes âgées continuent d’être confrontées à un double coup dur lorsqu’il s’agit des médias :

1. La première est l’annihilation symbolique, un autre concept de recherche astucieux selon lequel si vous NE VOYEZ PAS de gens comme vous dans les médias que vous consommez, cela vous incite à penser que vous devez être sans importance, d’une manière ou d’une autre. 

Il est de notoriété publique que l’industrie cinématographique est incroyablement âgiste, en particulier à l’égard des femmes, et qu’elle a été invitée à changer cette situation. Toutefois, pour vous donner une idée de la sous-représentation des personnes âgées : Lors du Marché du Film 2022, qui fait partie du Festival international du film de Cannes, il n’y avait que 60 films sur plus de 2200 qui avaient un·e adulte plus âgé·e dans un rôle principal et dont l’histoire tournait essentiellement autour de la personne âgée. Cela ne représente que 2,7 % de tous les films du Marché du Film de Cannes, alors que les personnes âgées représentent plus de 10 % de la population mondiale et plus de 19 % de la population canadienne. 

2. Le deuxième concept est que plus vous consommez de médias, plus ils sont susceptibles de s’accumuler dans votre conscience et votre inconscient, et l’effet accumulé est de vous faire sentir que ce que vous VOYEZ est normal. 

Une étude de l’American Association of Retired Persons (2019) a montré que les personnes de plus de 50 ans sont 7 fois plus susceptibles d’être représentées de manière négative que les personnes de moins de 50 ans. La recherche canadienne est moins complète, mais un rapport de recherche de 2023 a examiné les films et les émissions télévisées tournés en Colombie-Britannique et a constaté que les personnes âgées : 

• étaient plus de deux fois plus susceptibles d’être dépeintes comme étant des personnes grosses et en situation de handicap,
• sont plus souvent dépeintes comme des personnes méchantes et antagonistes,
• sont moins susceptibles d’être montrées comme des personnes sexy, intelligentes et drôles. 

Passons à une autre forme de média : les nouvelles. Des chercheur·euse·s de l’Université d’Ottawa ont analysé la manière dont les médias canadiens ont présenté les personnes âgées et le vieillissement lors de cinq catastrophes canadiennes (la pandémie n’en faisait pas partie). Ils·Elles ont constaté que la couverture médiatique était très divergente : les articles de presse étaient principalement négatifs, accentuant la vulnérabilité et le manque de résilience des personnes âgées, ou ils présentaient le contraire, dépeignant les personnes âgées comme des « personnes âgées super ».

Ainsi, pendant des décennies, les personnes âgées se sont à peine vues représentées dans les films et les médias, et lorsqu’elles le sont, c’est surtout comme des personnes fragiles, isolées, incapables, sur le déclin, grosses, pas sexy, pas intelligentes, pas drôles, voire comme des méchants. À l’inverse, lorsqu’elles sont montrées de manière positive, c’est en tant que « personne âgée super », quelqu’un·e avec qui la plupart des gens ne peuvent pas s’identifier.

Vous vous dites peut-être : « Ouin… L’avenir ne semble guère prometteur! »

Mais, maintenant, quelques nouvelles encourageantes : le mouvement contre l’âgisme prend de l’ampleur et les médias grand public changent.

En 2018, j’ai lancé un festival du film pour tenter d’opérer un changement culturel positif à l’égard de l’âge, le premier du genre au Canada et un des six seuls au monde. Aujourd’hui, deux festivals de films axés sur le changement d’attitude à l’égard du vieillissement existent au Canada, et de nouveaux festivals voient le jour dans des pays à travers le monde.

En tant que festival du film de niche traitant d’une question de justice sociale qui en était à son stade naissant, nous n’avons vu que 100 films soumis pour considération en 2018. Cela peut sembler beaucoup, mais un autre festival qui a démarré la même année et qui était uniquement axé sur le cinéma a reçu plus de 800 films. Je suis heureuse de dire que nos soumissions ont triplé depuis, en partie parce que nous gagnons en réputation dans l’industrie cinématographique canadienne, mais aussi parce que le mouvement contre l’âgisme prend de l’ampleur.

Les cinéastes canadien·ne·s et internationaux·ales commencent à en tenir compte, en créant des films tels que Thelma, Ladies of Steel, Testament, etc. De plus, des acteur·trice·s célèbres commencent à s’exprimer et à défendre leur cause.

• Jane Fonda a abordé ce sujet avant même son discours TED de 2010 sur le troisième acte de la vie.
• Maria Shriver a reçu des personnalités telles que Jamie Lee Curtis, Rob Lowe et Goldie Hawn lors de sa conférence Radically Redefining Aging en février 2022.
• Ici, au Canada, Mary Walsh, de CODCO et de This Hour has 22 Minutes, s’est exprimée sur les femmes et le vieillissement dans son court métrage, Radical.

Si vous avez besoin d’autres raisons de penser positivement au vieillissement : nous vivons plus longtemps parce que nous vivons plus sainement. De plus, en 2008, Blanchflower et Oswald ont publié une étude démontrant que notre bonheur suit une courbe. Il commence par être élevé dans notre jeunesse, lorsque nous sommes le plus heureux·euse, puis il atteint son point le plus bas à l’âge mûr, lorsque la vie devient plus stressante, avant de remonter à mesure que notre bonheur dépasse celui de notre jeunesse.

Cette positivité et ce bonheur sont constamment remis en question. Les médias, en particulier le cinéma et les médias publicitaires, influencent considérablement notre vision du vieillissement, donnant souvent aux personnes âgées des rôles négatifs ou limités qui renforcent les stéréotypes. Or, le vieillissement n’est pas une maladie, mais une étape naturelle de la vie, qui offre des possibilités uniques de croissance et d’épanouissement. De plus, le vieillissement ne devrait jamais être utilisé comme un prétexte ou une excuse.

Voici quelques moyens de refaçonner ces points de vue :

• Faites-vous entendre : Il est temps de montrer tout l’éventail des possibilités offertes par le troisième acte de la vie, la capacité des personnes âgées à apporter leur contribution, ainsi que la puissance et la plénitude du travail et des relations intergénérationnels.
• Ajustez votre attitude : Acceptez de vieillir et laissez libre cours à votre imagination et à toutes les possibilités qui s’offrent à vous. Vous devez en rêver avant de pouvoir le réaliser. Imaginez activement à quoi ressemble votre meilleur troisième acte.
• Remettez en question vos propres attentes : Lorsque vous consommez des médias, demandez-vous s’ils alimentent un stéréotype négatif ou s’ils donnent une image réaliste de ce que pourrait être le vieillissement. J’encourage tout le monde à analyser de temps en temps la façon dont un film vous fait sentir et influence vos opinions.
• Parlez, parlez, parlez : La narration à travers la cinématographie a la capacité de déclencher un changement sociétal. Cependant, ce sont les discussions qui cimentent réellement le changement d’attitude, alors parlez-en! Un excellent moyen de stimuler la conversation est d’assister à une projection au THIRD ACTion Film Festival ou au Ageless Film Festival.

Alors que nous entrons dans nos troisièmes actes, rappelons-nous que le vieillissement n’est pas une malédiction, mais une occasion, l’occasion de vivre avec un but, avec créativité et avec joie. En changeant notre façon de penser, de parler et de nous engager dans le vieillissement, nous pouvons passer d’un récit de déclin à un récit de potentiel. Adoptons les aspects positifs du vieillissement, exigeons une meilleure représentation dans les médias et façonnons activement un monde où le vieillissement n’est pas perçu comme une fin, mais comme un chapitre vibrant et épanouissant. Le pouvoir de changer l’histoire du vieillissement est entre nos mains. Écrivons-la ensemble.

Références (cliquez ici pour consulter les sources)

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